Partout, on entend dire que « le marché immobilier parisien reprend des couleurs ». Mais de quelle reprise s’agit-il réellement ? Faut-il s’attendre à une envolée des prix dès 2025, ou plutôt à une stabilisation progressive mettant fin à la baisse des dernières années ? Peter Jorgensen, expert du marché parisien et chasseur immobilier, partage son analyse sur les perspectives à venir pour l’immobilier dans la capitale.


Pensez-vous que la baisse des taux d’intérêt va redynamiser le marché immobilier parisien ?

Si une réduction des taux d’intérêt peut sembler propice à un regain d’activité immobilière, elle ne garantit pas nécessairement une relance du marché de l’immobilier notamment à Paris. Une analyse des tendances passées illustre ce point de manière claire.

[Graphique 1 : Évolution des prix et des taux à Paris depuis 2011]

Entre 2011 et 2015, les taux d’intérêt ont chuté de 4 % à moins de 2 %, une baisse significative qui aurait dû stimuler les prix de l’immobilier parisien. Pourtant, le marché a affiché une correction d’environ 6 % sur cette période. Cette décorrélation montre bien que d’autres facteurs influencent le marché.

Un autre exemple plus récent renforce cette observation : entre le premier trimestre 2022 et le premier trimestre 2023, les taux ont bondi de 1 % à 3 %. On aurait pu s’attendre à un ralentissement de l’activité, mais les prix ont progressé de 1,5 %. Cette dynamique s’explique par le comportement des acheteurs, pressés de profiter de taux encore abordables avant une éventuelle nouvelle hausse.

Cependant, ce qui a réellement enclenché la baisse des prix en 2022 n’est pas la hausse des taux en elle-même, mais la contraction drastique des crédits immobiliers. La hausse rapide des taux, couplée à des seuils de taux d’usure contraignants, a freiné les prêts bancaires pour de nombreux acquéreurs, entraînant un ralentissement marqué de la demande.

Ainsi, ce n’est pas uniquement une baisse des taux qui relance le marché immobilier, mais surtout la capacité des banques à accorder des crédits. Bien que la baisse amorcée en 2024 ait été une bouffée d’air frais pour le marché, il serait irréaliste d’espérer un retour à des niveaux proches de 1 %, comme ceux observés entre 2015 et 2020.

Les projections pour 2025 restent néanmoins optimistes : les taux pourraient descendre sous les 3 % sur 20 ans, voire approcher les 2,5 % si aucun crack de credit n’est observé en France d’ici là aux vues de l’instabilité politique actuelle en France et des choix budgétaires pouvant faire vasciller les marches financiers. Une telle évolution serait un signal encourageant, mais la clé résidera dans la politique des banques, qui devront maintenir un accès fluide au financement pour les acquéreurs.

En résumé, la véritable reprise du marché parisien ne dépendra pas seulement des taux plus bas, mais notamment de la volonté des banques de financer les projets immobiliers en 2025.

Comment le pouvoir d’achat des acheteurs parisiens va-t-il évoluer ?

Ces dernières années, la montée en flèche des taux d’intérêt a lourdement impacté le pouvoir d’achat des acheteurs à Paris. Prenons un exemple concret : en 2020, un emprunteur souhaitant acquérir un appartement familial d’une valeur de 1 000 000 € pouvait envisager des mensualités de 4 660 € grâce à des taux proches de 1 %. Cependant, au pic des taux en 2023, cette même mensualité ne permettait plus d’emprunter que 750 000 €, soit une perte de capacité d’achat significative.

À l’horizon 2025, le pouvoir d’achat des acheteurs parisiens pourrait connaître une amélioration. Si les taux d’intérêt reculent sous la barre des 3 % et si les prix de l’immobilier à Paris restent stables, les acheteurs retrouveraient une capacité d’achat proche de celle qu’ils avaient en 2022. Cela leur permettrait d’acquérir des surfaces similaires à celles qu’ils pouvaient viser avant la flambée des taux.

Cette perspective représente une excellente nouvelle pour le marché parisien, en particulier pour les acquéreurs qui attendaient des conditions plus favorables pour relancer leurs projets immobiliers. Une reprise graduelle pourrait ainsi se dessiner, soutenue par un regain de confiance des acheteurs.

Cependant, tout dépendra de plusieurs facteurs. Si les taux d’intérêt se stabilisent autour de 2,8 % sans descendre davantage, le pouvoir d’achat ne connaîtra qu’une amélioration modérée. De même, une remontée des prix, même légère, pourrait à nouveau limiter la capacité des acquéreurs, freinant ainsi la reprise. Ces éléments plaident donc en faveur d’un redémarrage progressif du marché plutôt que d’une envolée brutale de la demande en 2025, ce qui éviterait une nouvelle surchauffe des prix.

En 2025, les attitudes des vendeurs parisiens devraient largement varier en fonction de la période à laquelle ils ont acquis leur bien.

Commençons par ceux ayant acheté après 2020 et entrepris des rénovations importantes. Pour cette catégorie, la baisse des prix combinée à l’augmentation des coûts des matériaux risque de conduire à des pertes financières. Ces vendeurs, souvent convaincus de la valeur ajoutée de leurs travaux, pourraient avoir tendance à surévaluer leurs biens dans l’espoir de limiter leurs pertes. Pourtant, cette approche, fondée sur des attentes irréalistes, pourrait s’avérer contre-productive, voire désastreuse.

En revanche, les vendeurs ayant acheté leur bien entre 2015 et 2019 se montreront probablement plus pragmatiques. Ayant bénéficié de la hausse des prix durant cette période, ils seront souvent en mesure de fixer des prix alignés sur les réalités actuelles du marché. Cette souplesse leur permettra d’intégrer la baisse récente des prix sans subir de perte significative.

Enfin, les baisses de prix importantes devraient surtout provenir des vendeurs en situation de contrainte. Cela inclut notamment ceux engagés dans un prêt-relais ou faisant face à une vente prolongée. Ces vendeurs, poussés par l’urgence, seront souvent les premiers à ajuster leurs prix de manière marquée pour trouver rapidement preneur.

Une rencontre entre l’offre et la demande est-elle possible ?

Sur le marché immobilier parisien en 2025, deux visions diamétralement opposées risquent de s’affronter pendant plusieurs mois. D’un côté, les vendeurs, encouragés par des articles signalant un redémarrage du marché, tenteront de rehausser leurs prix. De l’autre, les acheteurs, bien informés de la baisse des prix ces dernières années, poursuivront leurs négociations avec fermeté, d’autant plus que l’offre reste abondante.

Dans ce contexte marqué par des attentes divergentes, le rôle des professionnels de l’immobilier s’avèrera plus crucial que jamais. Les agents immobiliers devront sensibiliser leurs clients vendeurs à l’importance de fixer un prix juste, en évitant les surévaluations qui pourraient freiner la vente. Du côté des chasseurs immobiliers, notre mission sera d’aider nos clients acquéreurs à adopter une approche de négociation cohérente, alignée sur la réalité du marché.

En tant que professionnels complémentaires, nous aurons un rôle clé de médiateur. Notre objectif commun sera de rapprocher les positions des deux parties et de faciliter des compromis équilibrés, indispensables pour concrétiser les projets immobiliers dans un marché parfois sous tension.

Peter Jørgensen

Peter Jørgensen est spécialiste de la chasse immobilière à Paris depuis plus de 10 ans. Il a fondé et dirige aujourd’hui le cabinet de chasseur immobilier Peter Jørgensen Consulting, spécialisé dans la recherche de biens à Paris.
Fort de son expertise en finance, il a mis au point un outil d’estimation performant qui permet d’évaluer avec précision les biens immobiliers.
Membre actif et l’un des premiers adhérents de la Fédération des Chasseurs Immobiliers (FCI), Peter Jorgensen participe activement à la promotion et à la reconnaissance de ce métier auprès des pouvoirs publics et des autres acteurs de la transaction immobilière.
En parallèle, Peter a également co-dirigé un centre de formation en immobilier (estimation immobilière, découverte client et chasse immobilière).

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